mercredi 1 novembre 2017

Ibrahim Boubacar Keïta, Président de la République du Mali rend hommage à Irina Bokova, Directrice Générale de l'UNESCO

A la suite de son intervention Au Forum des dirigeants  à la 39e session de la Conférence générale de l’UNESCO le 31 octobre 2017,
Le président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta a rendu hommage à Irina Bokova, Directrice Générale de l’UNESCO, un hommage avec le défilé de mode du styliste Nigérian Alphadi animé par la musique Mandingue.
Voici  l‘extrait de son discours :
S.EXC. Ibrahim Boubacar Keïta au milieu, Irina Bokova à droite









Le terrorisme est devenu une gangrène planétaire qui appelle à un combat sans relâche. Comme un caméléon, il s’adapte à tous les contextes, utilisant tous les moyens modernes, et frappe d’innocentes personnes en toute lâcheté. Notre réponse ne doit ni attendre, ni être tributaire de calculs politiciens.

A ces actes de désolation, nous devrons être capables de réagir avec vigueur et faire maintenir l’espoir partout dans le cœur des enfants du monde. Nous devrons refuser que la haine ne l’emporte sur l’amour entre les hommes. Nous devrons refuser que les armes ne l’emportent sur la raison et sur les cœurs. Je salue à cet égard les efforts de l’UNESCO pour faire du Forum de Bakou un lieu d’échange stratégique sur les questions d’extrémisme violent. Notre participation à ce rendez-vous important témoigne de l’intérêt du Mali à raffermir sa coopération avec tous les acteurs œuvrant pour le rapprochement des cultures.


Ibrahim Boubacar Keïta, Président de la République du Mali aux cotés de son épouse à gauche

Ces actes aussi violents soient-ils, ne doivent aucunement vaincre notre résistance et notre détermination à faire dialoguer nos civilisations et nos cultures. C’est cette preuve que le Mali souhaite administrer en organisant le 1er octobre 2017, ici-même, une table ronde sur le dialogue des cultures. Par la magie du cinéma, deux cultures (occidentale et africaine), représentées par des figures emblématiques comme Jean Rouch et Amadou Hampâté Bâ, nous rappellent la nécessité de promouvoir le dialogue des civilisations pour faire prospérer un monde de paix.

Défilé de mode par Alphadi

Le film que vous êtes invités à visionner en levée de rideau, tourné en 1984, évoque déjà à cette période, des questions qui se posent à nous aujourd’hui avec acuité. Pour nous rappeler que rien ne vaut le dialogue ! Il doit être notre rempart contre l’extrémisme. Il doit être notre source d’énergie.

L’ingénieur français, fasciné par les cultures africaines et converti en un de leurs chantres le plus illustre, rencontre un symbole vivant de ces mêmes cultures en l’occurrence Amadou Hampâté Bah dans sa maison d’Abidjan. De leur dialogue, il ressort que l’homme doit cheminer vers l’homme pour son plein accomplissement. C’est une belle leçon de vie qui vaut notre attention.


Le président de la République du Mali offre un tableau la DG Irina Bokova



Mon pays, empêtré dans une crise multidimensionnelle, retrouve son chemin depuis la signature de l’Accord de paix. Certes, la mise en œuvre dudit Accord, sous la supervision de la médiation internationale, exige d’énormes sacrifices de toutes les parties. Pour sa part, le Gouvernement du Mali ne ménage aucun effort pour mettre pleinement en œuvre l’Accord. Dieu seul sait que nous avons consenti des sacrifices et que des progrès sont remarquables en dépit des défis inhérents à un tel processus.
 
La mise en place du commandement opérationnel du G5 Sahel à Sevaré, au Mali, consacre le démarrage des activités de cette alliance des Etats du Sahel pour mutualiser leurs efforts en vue de vaincre le terrorisme.
Le G5 Sahel complète le dispositif militaro-sécuritaire composé des forces onusiennes (la MINUSMA), des forces Barkhane de la France et des FAMA.


Il me plait de saisir l’opportunité de cette tribune pour vous remercier encore une fois pour la solidarité manifestée à l’endroit du Mali. On se souvient au Mali et ailleurs des effroyables images de destruction des mausolées de Tombouctou et de l’autodafé des anciens manuscrits.

Effondrée par l’horrible spectacle, Madame la Directrice générale, vous avez promis de ne pas croiser les bras. Sous votre impulsion, l’UNESCO a lancé une vaste campagne de reconstruction du patrimoine culturel mondial du Mali. Votre appel au monde, le plan d’action adopté et les différentes initiatives qui l’ont mis en œuvre, ont permis de reconstruire les mausolées de nos saints, que vous avez personnellement inaugurés à Tombouctou en juillet 2015. Je me réjouis du succès de la fin de la 1ère phase du Programme de reconstruction et invite nos partenaires à nous accompagner pour la 2ème phase.

Que la maison de René Caillé, chrétien côtoie les proches avenues de Sankoré et soit un objet d’attraction dans une ville majoritairement musulmane, suffit à mesurer l’esprit de tolérance des populations et la nature de l’islam qu’elles pratiquent.

En détruisant les mausolées de cette ville symbole de l’islam, les terroristes ont voulu provoquer l’indignation ; ils ont voulu tout effacer ; mais oublient-ils que l’histoire ne s’efface pas d’un coup de canon. Tombouctou, ville patrimoine de l’humanité, ne s’effondrera pas sous la première menace. Ceux qui ont décrit Tombouctou, René Caillé, Gordon Laing, Heinrich Barth et Oscar Lenz n’ont nulle part vu des signes d’intolérance dans cette cité. Ils ont admiré la civilité des populations, civilité soutenue par la culture immense d’hommes de lettres et de sciences à Sankoré, une prestigieuse université médiévale.

Dès lors, je me réjouis de l’issue du procès historique d’Al-Faqhi qui présente les germes de l’espoir que ceux qui détruisent répondront de leurs actes devant la justice universelle.  

Les manuscrits que nos sages maîtres ont légués à la postérité, contiennent des connaissances qui nous auraient servi à consolider notre entente et notre vivre-ensemble. J’appelle au soutien de l’UNESCO encore une fois pour faire parler les manuscrits dès lors que les conditions seront créées pour leur exploitation paisible.

La conférence d’Abu Dhabi de décembre 2016 suivie de la conférence du Louvre ouvre de nouvelles perspectives dans la mobilisation des moyens pour la protection de notre patrimoine commun. Je salue la France, les Emirats arabes unis et la Suisse pour leurs efforts dans ce sens.

J’appelle tout aussi au soutien de l’ensemble de la communauté internationale et en priorité aux Etats africains pour une véritable diffusion de l’histoire générale de l’Afrique et la réalisation du 9ème volume. Cet important travail scientifique réalisé, doit servir l’humanité. La signature par les artistes maliens de la Déclaration d’engagement pour la Coalition des artistes pour l’Histoire générale de l’Afrique, prouve si besoin en était, le grand intérêt du Mali pour ce projet majeur.

Notre indignation est grande devant les scènes de destruction de biens appartenant à l’humanité et témoignant de la créativité des civilisations humaines. Tout comme notre indignation est grande, notre colère est ouverte face aux tergiversations de la communauté internationale. Le monde ne peut demeurer à regarder que la folie de quelques nervis effacent des siècles de traces de notre histoire commune.

Madame Bokova,

Au moment où vous terminez votre mandat à la tête de cette vénérable institution, permettez-moi de vous dire l’hommage du Mali et de Tombouctou. Vous n’imaginez pas l’immense bonheur de tout un peuple, qui vous reste reconnaissant, pour tout ce que vous avez pu lui apporter durant ces années.

Par ma voix, le Mali vous dit merci et vous souhaite bonne chance dans la nouvelle vie que vous allez entamer.

Le monde est confronté à l’extrémisme violent et à d’autres défis menaçant même la paix dans le monde, gage de tout développement. Ces défis justifient la nécessité de renforcer le rôle de l’UNESCO et notre collaboration avec elle. Son action dans l’éducation à travers l’Agenda 2030, doit être soutenue pour transformer les hommes en véritables acteurs du monde et de son développement.

Unis, nous saurons faire régner la joie dans le cœur des tous et la paix dans l’esprit de tous. Ainsi nous aurons été dignes de nos illustres devanciers qui en fondant notre belle organisation étaient convaincus que « « les guerres prenant naissance dans l'esprit des hommes, c'est dans l'esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix ».


Thérèse Diatta Ngoboh


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